Place de Dijon, sud-est de la ville, 1876-1877. 252 m/alt. Dénommé fort Junot, il flanquait l'amont de la vallée de l'Ouche et la route de Dole. Il s'agit d'un grand pentagone régulier avec courtine à la gorge. La défense de cette dernière était similaire à celle du fort d'Asnières, ce que nous ne pouvons affirmer que sur base de plans car, hormis les coffres, accessibles par l'intérieur, la gorge a complètement disparu, en ce compris le ravelin en terres levées sur les glacis face à l'entrée. Le bâtiment d'entrée, en fond de courtine, était surmonté à gauche et à droite d'une casemate à tir direct orientée perpendiculairement à la gorge. Les fossés, quant à eux, ne laissent plus apparaître qu'en de rares endroits leur contrescarpe faite d'arceaux en décharge. On se retrouve d'emblée devant les douze travées sur deux niveaux du casernement. De gauche à droite, on trouve trois travées de largeur normale, une plus étroite, trois autres normales suivies d'une quatrième plus étroite sous laquelle passe la capitale et à la droite de laquelle le schéma de gauche se répète. Les travées n° 3 à 6 n'ont plus de façade. Depuis l'extrême gauche, un escalier autorise un accès au premier étage. Cet escalier est éclairé par un puits à lumière dont la partie inférieure, oblique, est garnie comme à l'accoutumée de carreaux de faïence blancs. Cependant, ici, ces carreaux sont de dimensions inhabituelles car ils ne font pas moins de 92 cm de long sur 26 de large en lieu et place des carrés de 15 x 15 cm et 20 x 20 cm couramment répandus. Le couloir de circulation du premier étage possède encore ses rambardes originelles. Comme à Asnières et à Varois, son plancher est composé de voussures en briques dont la face supérieure a été cimentée, voussures de peu de portée et appuyées sur des poutrelles placées perpendiculairement au couloir sur toute la largeur de celui-ci. Ce plancher, comme à Asnières et Varois, s'interrompt à environ un mètre du mur en vis-à-vis des portes des chambrées, dégageant ainsi sur toute la longueur du couloir un espace libre jusqu'au rez-de-chaussée pour la lumière provenant des puits. Les coffres de la courtine sont accessibles, surtout celui de droite qui est bien dégagé et, par conséquent, photogénique. Ses deux petites visières sont chacune précédées d'un fort crochet scellé dans le plafond. Notons la présence d'un petit magasin à projectiles dans chacun de ces coffres. Le grand magasin à poudre de droite n'a pu être visité par l'intérieur, seule la galerie de circulation étant libre. La chambre aux lampes montre trois créneaux sans particularité. Par l'un de ceux-ci, nous avons pu constater que le local de stockage était sain, à la voûte en plein cintre, aux flancs garnis de barbacanes et aux parois totalement recouvertes d'un enduit de ciment. Par contre, les magasins aux cartouches installés symétriquement dans la gaine du coffre de courtine gauche ont encore les cadres en bronze des créneaux à lampe et même un ensemble cadre/vitre complet et intact. Par la capitale, nous accédons à deux locaux occupés par des latrines. Celui de droite, barré dans sa longueur par un puits d'aération dont la margelle indique qu'il était possible de l'obturer lors de la mise en défense du fort, aligne 6 latrines dont 2 aux murs hauts de 2 m et 4 aux murs d'1,5 m. Celui de gauche, au plafond barré de la même manière, a en son centre un bloc de 2 x 6 latrines alignées dos à dos, bloc dont le tour complet est rendu possible par l'isolement des logettes des murs environnants. Les deux locaux montrent des latrines encore toutes pourvues de leur porte métallique d'origine (139 cm de hauteur sur 74 cm de largeur). Cette disposition dos à dos est assez peu courante (Musoirs Est et Ouest à Cherbourg, Plesnoy à Langres,…). Les quatre casemates à tir indirect, adossées au massif central, sont assez peu accessibles. Assez singulièrement, leurs embrasures affleurent le sol de la rue du rempart. Au travers de la végétation seule la casemate n° 3 peut être valablement observée. La rue du rempart joint les saillants I à V. Elle aligne quinze traverses-abris dont sept enracinées. Les traverses enracinées n° 2, 3, 5 et 6, soit celles cernant les saillants II et IV, constituent des casemates à tir direct. La n° 2 a un superbe sol cimenté tandis que les n° 3 et 5 n'ont que de la terre battue. Les maçonneries y sont d'une qualité irréprochable. Leurs bras, ainsi que ceux des traverses voisines, sont parfois murés, parfois libres ; parfois même ils possèdent leur porte de bois. Le talus de l'autoroute ampute le fort de son saillant IV. Pratiquement, cela se concrétise par une coupure, après quelques mètres, de la descente vers l'aileron de ce saillant ; de la casemate à tir direct de la traverse n° 6 il ne subsiste que les quatre premiers mètres quant à la traverse à sa droite elle n'a pu être discernée dans la végétation mais il y a fort à parier qu'elle n'existe plus. Enfin, la dernière traverse enracinée proche du saillant V est, quant à elle, coupée à hauteur de ses bras. Si l'aileron du saillant II a une descente en terre, la caponnière de tête en revanche a un escalier-rampe composé d'une première volée de 20 marches suivie d'un palier de 3 mètres puis d'une seconde volée de 31 marches. Cet escalier-rampe a une pente très faible, la marche étant de 40 cm et sa contremarche de 13 cm. L'intérieur de la caponnière double est noyé sous 25 cm de liquide opaque, mélange de gasoil, d'huiles et d'on ne sait trop quoi de nauséabond. Cela nous a empêché de distinguer les emplacements des canons de 12 culasse desquels nous aurions pu effectuer un comparatif avec celui de l'aileron du saillant II. Ce dernier, une plate-forme bétonnée modèle 1886, pour le canon de 12 culasse, situé en arrière créneau central, est placée 40 cm plus bas que le sol de la caponnière mais, surtout, on a ménagé un cadre en béton avec une pente douce de 2,5 m de long sur le côté gauche de la plate-forme. L'aileron et la caponnière double ont, chacun, trois pièces par direction flanquée. Le comptage des plates-formes d'artillerie ajoutées aux pièces de défense des fossés nous donne une artillerie de 42 à 44 canons dont 16 ou 18 de rempart, 10 sous casemates et 16 de flanquement. Selon nous, sa garnison devait se monter à environ 700 hommes. Le fort est dit à batterie basse. En fait, à Dijon, seul celui de la Motte Giron peut se targuer de posséder un cavalier. Les dessus du casernement de Sennecey étaient organisés en position d'infanterie avec deux débouchés que nous n'avons pu observer. Nous ne lui connaissons pas de batterie annexe. Le fort sera le théâtre de l'épilogue d'une affaire de collaboration avec l'ennemi qui aura tenu la région en haleine depuis l'agression, le 26 janvier 1944, du chanoine Kir (22 janvier 1876 - 25 avril 1968), celui-là même à qui l'on doit le célèbre apéritif et dont le franc-parler a laissé de truculents souvenirs dans la région. En juillet 1946, 45 collaborateurs, certains, tueurs au profit du service de renseignements allemand, attendirent le verdict d'un procès qui allait durer trois semaines. Au terme de celui-ci, la cour prononça 21 condamnations à mort dont 15 par contumace. Les six condamnés restants, ainsi que deux autres dont l'affaire était distincte, furent passés par les armes dans un fossé du fort le 30 octobre 1946. Pour qui n'est pas averti, voir Sennecey aujourd'hui (06/2002) occasionne un choc. L'ensemble des glacis et du fort est occupé par le "Comptoir du matériel". Cette entreprise récupère bon nombre de métaux et les stocke où elle peut, c'est-à-dire partout en un invraisemblable capharnaüm (duquel émergent nombre de véhicules militaires dignes d'intérêt) au sein duquel il faut se frayer un chemin. À cela on rappelle le fait que quasiment tout le bâtiment d'entrée a sauté en 1944, emportant au passage quelques façades de la caserne ; que les fossés sont en voie de comblement et que l'autoroute a rogné tout le saillant IV et voilà un tableau peu idyllique rapidement brossé. Toutefois, ce serait une grossière erreur de rebrousser chemin. Ce fort nous a véritablement passionné, bon nombre de huisseries et ferrailles d'origine sont en place et les murs sont exempts de tags. Le tout est de faire fi du décor et de ne s'attacher qu'aux maçonneries et vestiges d'époque. Une merveille ne perd jamais la totalité de sa superbe. Le fort est une propriété privée et ne se visite pas sans autorisation.