Place de Langres, nord-est de la ville, 1877-1879. 459 m/alt. Dénommé fort Médavy. 841 hommes et 47 pièces pour le seul réduit, soit 33 pièces de rempart, 10 de flanquement et 4 mortiers. En temps de guerre, la garnison se portait à 1206 hommes. Le môle du Plesnoy formait, avec le fort de Dampierre, un duo redoutablement puissant au fond du goulet de la trouée de Charmes. Le plateau au centre duquel se situe le fort peut-être comparé à un trèfle très étalé dont le pétiole, un isthme, est rattaché au mont Lambert. Chaque arrondi de ce trèfle, plus l’isthme, comprend une batterie annexe. Ces dernières sont parfois numérotées de 1 à 4 ou désignées par leur nom Boulanger : Corhm, Lavarande, Noailles, Dupré. Cette profusion d'ouvrages a parfois valu au fort de prendre, très à propos, le nom de réduit. Ce réduit consiste en un fort à batterie basse. Il affecte la forme d’un trapèze régulier dont la gorge est légèrement rentrante. La défense de cette dernière repose sur les feux croisés de deux coffres encadrant une courtine. La défense du périmètre est complétée par une caponnière double au saillant II et simple au saillant III. Au devant de l’entrée, la contrescarpe comprend un petit ravelin à l’escarpe partiellement revêtue, mais dépourvu, à tout le moins de nos jours, de tout corps de garde. L’entrée d’escarpe se situe elle-même légèrement en retrait du fond de la courtine. Les retraits latéraux comprennent, à droite un créneau assurant la défense rapprochée et perpendiculaire du porche d’entrée, à gauche une poterne. Le bâtiment d’entrée et sa couverture de terres protectrices ont été recouverts de tuiles à une époque que nous n’avons pu déterminer. De part et d’autre de cette entrée, le fond de la courtine est occupé par deux fois trois chambrées sous les deux fenêtres desquelles un large créneau de pied a été aménagé. Le couloir de circulation de ces chambrées dessert les chambres aux lampes de deux magasins à poudre. Le local de stockage de ces magasins a pour dimensions 12 x 7 m et leur sas donne sur une galerie perpendiculaire à la gorge, galerie desservant, dans sa partie basse, un coffre de courtine et débouchant dans sa partie haute dans un passage latéral de la première cour du fort. Ces deux magasins ont conservé leur plancher et arborent deux lignes de corbeaux juste au-dessus desquelles un enduit de ciment recouvre la totalité de la voûte. Cet enduit canalisait les eaux tant de condensation que d’éventuelles infiltrations. Lescoffres de la courtine sont étonnamment profonds avec douze mètres entre leurs embrasures et le mur opposé. Un très large créneau de pied emprunte toute la largeur des deux petites visières de leur façade. Les embrasures en arrière de ces visières sont ménagées dans de la maçonnerie de briques. Les volets obturateurs de l’embrasure principale, glissants latéralement dans un cadre métallique, sont encore présents. Le porche d’entrée est désormais dépourvu de toute trace de son pont-levis, mais nous subodorons qu’il s’agissait d’un modèle à bascule en dessous. Ce porche franchi, une première cour s’ouvre transversalement, cour sur laquelle s’alignent huit chambrées. À chacune de ses extrémités, un tunnel permet de rejoindre la rue du rempart non sans avoir longé l’extérieur du sas de deux autres magasins à poudre. Un imposant puits délivre sa lumière sur des ouvertures donnant dans le sas. Ce puits, à l’instar de tous les autres du réduit, se resserre dans sa partie supérieure en un magnifique travail de maçon. Ces magasins sont nettement plus grands que ceux accolés au casernement de gorge, avec 35 x 7 m comme dimensions. Eux aussi ont conservé leur plancher, ont leurs flancs garnis de corbeaux et ne comprennent que trois créneaux à lampe. La lumière provenant non du sas, mais bien du passage enraciné, l’ouverture au-dessus de la porte d’entrée du local de stockage est plus grande que de coutume. La fiche technique du Génie renseigne pour les quatre magasins une contenance cumulée de 96.000 kg de poudre en barils + 251.200 kg de poudre en caisses. Revenons dans la première cour et empruntons l’ouverture en capitale, entre les deux séries de quatre chambrées. Ce passage d’à peine trois mètres de largeur, débouche au-delà de la longueur des chambrées sur un gigantesque hall, tout à fait inattendu. La galerie triple pratiquement sa largeur et son plafond s’en va culminer à une hauteur estimée entre 13 et 15 mètres. La vue porte jusqu’à l’extrémité de la capitale, immédiatement en arrière du front de tête. Ce ne sont que courbes, voûtes en plein cintre et en arc segmentaire, arêtes, ouvertures, jeux de lumières. Probablement deux escaliers latéraux devaient-ils, comme à Dampierre, permettre d’accéder non à l’étage, mais bien aux deux niveaux supérieurs. Nous avons sous les yeux l’étonnant particularité, absolument unique, du fort de Plesnoy. Le fort comprend une énorme crête dorsale sous laquelle se trouvent deux niveaux de magasins, niveaux percés sur toute leur largeur et à trois reprises par des puits à lumière garnis de grilles (disparues). À en croire la fiche technique établie le 21 janvier 1880, nous avons là près de 800 m² de magasins d’artillerie. Une telle surface ne peut être justifiée que par le stockage intra muros et non comme à l’ordinaire dans un hangar, de la totalité des canons du môle, batteries annexes comprises. Sous ces magasins court le rez-de-chaussée de la capitale, rez-de-chaussée sur lequel, latéralement, se greffent de nombreux autres magasins dont une partie avec créneaux à lampe et, conséquemment, destinés aussi à l’artillerie. Parallèlement à cette dorsale nous trouvons les deux cours du casernement de la troupe. Les couloirs de circulation à l’arrière de ces chambrées se rejoignent en arrière du front de tête, en une courbe donnant à cette galerie la forme d’un fer à cheval dont les branches sont légèrement divergentes. À la racine de ces branches nous trouvons les latrines, elles aussi pourvues d’un superbe puits à lumière resserré dans sa partie haute. Les chambrées sont pourvues d’un dispositif de chauffage assez particulier. Un conduit passant sous le sol amène l’air puisé dans la cour (via quoi ? Une ouverture sous un appuie de fenêtre ? La question reste posée !), dans une espèce de chambre de visite circulaire dont l’unique diverticule débouche un mètre plus loin sous un poêle ou calorifère nettement détaché du mur de la chambrée. La partie courbe de la galerie en fer à cheval dessert la manutention dont les deux fours, pour 300 rations chacun, ne sont pas accolés comme d’ordinaire, mais occupent chacun un angle de la boulangerie. De chaque côté de la capitale, d’autres imposants magasins, dont les voûtes sont soutenues par d’épais piliers sont visibles. Dans celui de gauche, de nombreuses inscriptions murales en caractères cyrilliques peuvent être remarquées. Elles datent de la présence au fort de troupes russes durant la première guerre mondiale. Deux puits jouxtés chacun d’une citerne de 200 m³ sont situés à peu près au centre du réduit. Le massif central encadré par la rue du rempart, n’est coiffé que d’une crête d’infanterie. Si de l’artillerie pouvait éventuellement y prendre place, ce ne pouvaient qu’être des pièces de petit calibre. Les traverses de la rue du rempart sont semblables à celles rencontrées ordinairement dans la place, à savoir avec des alvéoles latérales. Toutefois, les traverses d’angle de cette rue, traduisez deux en arrière de chacun des saillants du front de tête, sont très particulières. Leur façade est identique à celle des autres, la première partie de leur local aussi, mais ce local s’élargit dans sa partie postérieure jusqu’à ménager un petit magasin appuyé à un pilier central. En, avant de cette rue du rempart, aux saillants II et III, une bonnette d’infanterie a été aménagée. Dans la caponnière double et l’aileron, la plate-forme Mle 1886 du canon de 12 culasse s’avance au-delà de la lèvre supérieure du créneau de pied. La galerie flanquante des faces a, comme partout ailleurs à Langres, été bétonnée et pourvue de goulottes pour grenades. La cloison opposée aux embrasures de l’aileron a, elle aussi, été bétonnée. Au rayon des curiosités, il convient de mentionner l’ouverture dans le mur de contrescarpe, à hauteur du coffre droit de la courtine, d’une galerie en « L » de peu de hauteur, longue de quatre mètres se terminant par le roc naturel. S’agit-il d’une amorce de contremine ? Cela existe-t-il aux saillants du front de tête ? Toujours est-il qu’une légende court sur la présence d’un magasin sous roc que les troupes U.S. auraient fait sauter. Aucun indice d’un tel magasin n’existe, pas même dans les archives que nous avons pu consulter. Dans cette galerie nous avons trouvé deux morceaux de verre épais provenant d’un créneau à lampe du réduit et abandonnés (innocemment ?) sur le sol en ces lieux incongrus. Le fort du Plesnoy est une propriété privée et ne se visite pas. En sus, la présence de déchets toxiques fait que les autorités sont très vigilantes et ce ne fut qu’à titre vraiment exceptionnel que nous avons pu étudier en octobre 2007 ce réduit qui n’a rien à envier aux autres grands forts de la place. Les maçonneries sont encore dans l’ensemble très saines, il ne manque qu’une sérieuse maîtrise de la végétation et les lieux mériteraient d’être ouverts au public, au moins pour les journées du Patrimoine.